Dernière mise à jour : 14 décembre 2022

Dans le cadre du premier débat au parlement sur l’immigration en France, le gouvernement a diffusé un dossier de presse commençant par une rubrique intitulée « 10 constats sur l’immigration en France ». Ces informations ont pour but de justifier les mesures envisagées dans le projet de réforme de la loi.

Déjà en 2019, avant le premier « grand débat » sur l’immigration initié par le gouvernement, un document interne avait été donné à tous les députés et sénateurs de la majorité, donnant quelques « chiffres clés » qui devaient servir d’arguments pour justifier les mesures de restriction.

Le problème étant que ce document comportait plusieurs erreurs factuelles, ce qu’avaient relevé plusieurs médias et même des députés de la majorité, plus informés que d’autres.

Le dossier de presse gouvernemental de cette année réitère l’opération, avec des éléments dont la présentation est parfois trompeuse, voire mensongère. Cet article va passer en revue et analyser les 10 « constats ». Il sera mis à jour régulièrement.

AFFIRMATION 1 – L’IMMIGRATION : UNE ACCÉLÉRATION DEPUIS 20 ANS

La présentation est trompeuse par plusieurs aspects :

La courbe du graphique de l’Insee, présente dans le document, montre que 1946 était une année particulièrement basse. En 1931 la part d’immigrés montait à 6,6%, soit à peine 0,7% de moins qu’en 1999. Il est donc aussi possible d’affirmer qu’en 90 ans, le pourcentage d’immigrés a « seulement » été multipliée par 1,5.

Le graphique de l’INSEE n’est gradué que de 1 à 12 en ordonnée, ce qui fausse la perception. Voici ci-dessous, à gauche, le graphique présenté dans le dossier de presse, et à droite le graphique présenté sur une échelle de 1 à 100%.

Le graphique du dossier de presse n’est pas « faux », il est juste présenté de telle sorte qu’il donne une perception erronée de l’augmentation de l’immigration en France.

Deuxième biais : réduire le « constat » aux données de l’immigration en France, sans éléments de comparaison, est subjectif. Tous les flux migratoires augmentent dans le monde, depuis la fin du 19e siècle. En se focalisant sur l’augmentation de la part des immigrés en France, sur les 20 dernières années, ce dossier de Presse du Gouvernement laisse entendre que notre pays fait face à une pression migratoire inhabituelle et particulière. C’est faux, la part des immigrés a même sensiblement plus augmenté à l’échelle mondiale qu’en France. Quant à la part d’émigrés français, son augmentation est à peine moins élevée, comme le montre le graphique ci-dessous.

Ensuite, le dossier de presse indique ceci :

Là encore, la formulation fausse la réalité. Quitte à s’appuyer sur les études de l’INSEE, il aurait été judicieux de montrer et détailler les chiffres du « solde migratoire », qui est le critère le plus objectif pour quantifier l’immigration.

Dans l’article de l’INSEE cité par le gouvernement, on peut consulter un graphique détaillant ces données des entrées et sorties depuis 2006. Ceci montre que le solde migratoire moyen, depuis 2006, est de 175 000… ce qui est presque 5 fois moins que les 850 000 annoncés par le gouvernement, qui cumule opportunément le nombre de titres de séjour délivrés mais aussi les renouvellements.

CONCLUSION DE L’ANALYSE DE CE PREMIER « CONSTAT » : UNE PRÉSENTATION TROMPEUSE

  • Si l’immigration a bien augmenté depuis 20 ans, cette évolution n’a rien de particulier à la France, elle est même un peu moins élevée qu’à l’échelle mondiale.
  • Communiquer sur le nombre de délivrance et renouvellement des titres, au lieu du « solde migratoire », n’est pas objectif.

Suite du document en cours d’analyse.