Dernière mise à jour : 7 novembre 2022

ÉTAT DES LIEUX

Actuellement, toute personne qui « facilite ou tente de faciliter, par aide directe ou indirecte, l’entrée ou le séjour irrégulier d’un étranger en France ou sur le territoire d’un autre État de l’espace Schengen » est passible d’une amende de 30 000 € et d’une peine de 5 ans de prison(1). Ceci ne changerait pas.

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PROJET DE RÉFORME

Dans le cas où ces actes seraient commis en « bande organisée » et « dans des circonstances qui exposent directement les étrangers à un risque immédiat de mort ou de blessures », les peines encourues passeraient à 1 M€ d’euros et quinze ans de prison. Pour les « dirigeants » et « organisateurs » de ces réseaux, les peines passeraient à 1,5 M€ et vingt ans de prison.

ANALYSE ET COMMENTAIRE

L’article 823-9(2), qui fixe le cadre des exceptions, serait maintenu, donc l’aide à l’entrée et au séjour, si elle se fait sans contrepartie financière, dans un but humanitaire, ne pourrait pas donner lieu à des poursuites. Pour rappel, il a fallu de nombreux combats juridiques pour empêcher la condamnation de femmes et d’hommes qui, par souci d’humanité, venaient en aide à des personnes étrangères. (cf. Décision du Conseil constitutionnel du 6 juillet(3) qui a donné une valeur constitutionnelle au principe de fraternité à la suite d’une saisine de Cédric Herrou).

 

Mais cette mesure est-elle justifiée ?

Il faut combattre et condamner lourdement les réseaux mafieux, quels qu’ils soient, qui exploitent et mettent en danger les hommes, femmes et enfants souhaitant entrer en Europe. Mais se contenter de les condamner, sans se poser la question du mécanisme qui permet à leur commerce mortifère de se développer, est insuffisant. De fait, c’est le refus de donner des visas aux ressortissants de certains pays et la fermeture des frontières extérieures de l’Union européenne qui est la source du commerce des réseaux de passeurs. Pas besoin de passeurs quand il y a des voies régulières de migration.
En tant que citoyens européens, nous pouvons nous rendre dans près de 180 pays souvent sans même avoir besoin d’un visa(4), en toute sécurité, en avion et pour une somme relativement faible. Un Soudanais(5) ou un Afghan(6), eux, ne pourront accéder qu’à une vingtaine de pays sans visa, et aucun de ces pays n’est européen. Le continent européen est le continent le plus mortifère pour les personnes migrantes : près de 50 000 morts depuis la fin des années 90.
Ce sont les pays européens qui, en fermant leurs frontières, en refusant d’ouvrir des voies légales d’immigration (alors que les voies légales d’émigration nous sont largement ouvertes), génèrent et alimentent ces commerces mafieux. Augmenter la criminalisation n’occultera jamais la responsabilité des États-membres dans la mort à nos frontières de milliers d’hommes, femmes et enfants. 

Pour aller plus loin :